Artemisia Gentileschi, une peintre au XVIIe

Rares sont les femmes peintres que l’on connaît de la période “baroque”, peut être même que vous n’en connaissez aucune. Mais Artemisia Gentileschi (1593-1652/53) fait partie de la minorité de celles qui ont su s’imposer au XVIIe. 

Si vous voulez voir la version vidéo : https://youtu.be/hb3r9kWZfsE


Fille d’un peintre bénéficiant d’une certaine renommée, Orazio Gentileschi, d’abord influencé par le maniérisme tardif est l’un des premiers peintres à suivre la peinture du Caravage (caravagisme). Orazio était même un ami de Caravage, l’influence de ce dernier est visible à la fois dans la peinture d’Orazio et dans celle d’Artemisia. Orazio lui enseigne la peinture dès son plus jeune âge mais ne lui apprend ni à lire ni à écrire (ce qu’elle fera bien plus tard) 
À 17 ans, elle réalise Suzanne et les vieillards. Elle sera comme dans cette peinture souvent son propre modèle à une époque où les papes interdisaient les nus féminins (les peintres détournaient l’interdit en prenant pour modèle des prostituées). Contrairement à son père Artemisia ne recherche pas la précision et une surface très lisse de la peinture et apporte une grande attention aux détails dramatiques des histoires qu’elle peint. Comme on peut le voir dans cette peinture où Suzanne exprime sa frayeur dans son visage et dans ses gestes.

Artemisia Gentileschi, Suzanne et les vieillards, 1610, huile sur toile, 170 cm x 121 cm, Château Weissenstein, Allemagne


Un événement va marquer un tournant dans sa vie de femme et d’artiste. L’académie de Saint Luc étant interdite aux femmes, en 1611 son père Orazio emploie donc un peintre (Agostino Tassi) pour lui enseigner la perspective. Mais elle se fait violer par ce dernier. L’affaire du viol abouti à un procès d’ailleurs non pour viol (qui importe peu à la justice papale) mais pour stupro qualificato (défloraison avec promesse de mariage) . Les témoins du procès dont Artemisia subissaient des tortures car l’on considérait à l’époque que cela pouvait démêler le vrai du faux. Artemisia subit la torture des “Sibylles” où l’on passe une corde entre les doigts et l’on serre parfois jusqu’à la brisure. Tassi fut condamné à l’emprisonnement et à 5 ans d’exil mais il ne subira pas sa peine car il était toujours sous la protection de puissants mécènes. Beaucoup d’historiens de l’art voient dans la violence de ses peintures une façon de prendre sa revanche.


Peu après l’affaire Orazio marie sa fille au peintre Pierantonio Stiattesi pour rétablir son “honneur”. En 1612, le couple déménage à Florence. C’est là qu’elle va recevoir sa première grande commande, la réalisation d’une fresque à la Casa buonarotti (la maison de Michelangelo). En 1616, Elle a été la première femme à être acceptée à l’Accademia delle Arti del Disegno (L’académie du dessin) à Florence, cela lui permet de signer son propre nom sur les contrats, acheter des couleurs, recevoir et négocier des paiements. Elle a aussi eu pour mécène Cosimo II de medicis. Bien qu’elle reçoit beaucoup de commande à Florence (portraits, scènes bibliques…) elle ne recevra pas de commande publique là-bas. 

Artemisia entretenait une relation avec Francesco Maria di Niccolò Maringhi. En 1621 elle part à Rome sans son mari. Rome est alors dominée par l’apogée du style baroque. Elle continue à être influencé par les peintures du Caravage et travaille notamment avec Simon Vouet. Mais Rome ne lui donne pas le succès qu’elle espérait, les commissions se font rares. Les commanditaires probablement peu habitués aux peintres femmes lui préfèrent d’autres peintres pour la réalisation de peinture de grands édifices. 


En 1630, Artemisia va à Naples continuant sa vie sans son mari mais avec sa fille Prudentia. En 1638, Artemisia est invité par Charles I à Londres. Son père Orazio était d’ailleurs peintre de cour là-bas depuis 1626. Orazio est un des premiers peintres italien à avoir introduit le caravagisme en Angleterre. À Londres, elle peint parmi ses toiles les plus connu comme son autoportrait en tant que l’allégorie de la peinture (1638)

Artemisia Gentileschi, Autoportrait en allégorie de la peinture, 1638-1639, huile sur toile, 98.6 x 75, 2 cm, Château de Windsor, Londres


N’ayant pas eu la même éducation que les hommes elle apporte une vision différentes de ceux-ci. Elle insuffle aux héroïnes mythologiques et bibliques une réelle capacité d’action contrairement à leur statut d’objet ou passif d’autres représentations.

Artemisia Gentileschi, Judith décapitant Holopherne, 1610, huile sur toile, 158.8 x 125.5 cm, Museo Capodimonte, Naples


On a longtemps confondu ses peintures avec celles de son père. Mais dans la publication Gentileschi père et fille de 1916 l’historien Roberto Longhi met son œuvre en lumière . Mais ce sont des historiennes des années 1970-80 (comme Linda Nochlin et Ann Sutherland Harris avec l’exposition “Women artists :1550-1950”, Mary Garrard.. ) qui révéleront véritablement l’ampleur du travail d’une artiste peignant les genres les plus nobles de l’époque comme la peinture historique ou la peinture religieuse. 

Artemisia Gentileschi, Judith et sa servante, 1612-1613, huile sur toile, 114 x 94 cm, Palais Pitti, Florence
Artemisia Gentileschi, Marie Madeleine en mélancolie, 1622-1625, huile sur toile, 122 x 96 cm, cathédrale Notre-dame-du-Siège de Séville

J’espère que cet article vous a plu et vous a appris de nouvelles choses. N’hésitez pas à aimer l’article ou à commenter, à bientôt !

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