J’ai envie de dessiner et de parler du parcours de ces femmes qui ont beaucoup apporté à l’art et à l’histoire. Personnalité d’exception, Elsa Schiaparelli à profondément marqué le monde de la mode. Je commence ainsi cette série de portrait de femmes en racontant brièvement l’histoire d’Elsa. Si vous voulez voir les étapes de l’illustration et la version audio :
https://youtu.be/mdn9CPLYSgU
Jeunesse
Elsa grandit dans un milieu intellectuel. Son père est professeur d’université spécialisé dans l’orient et sa mère fait partie de l’aristocratie italienne. Son oncle est aussi un astronome de renom et elle passe parfois faire un tour dans son centre d’observation. Petite, sa mère lui dit qu’elle est moins belle que sa sœur aînée. Alors la petite Elsa décide de planter des graines de fleurs dans sa bouche et ses oreilles. Les fleurs pousseront mieux sur son corps tiède se dit-elle et lorsqu’elles fleuriront elle sera la plus belle. Mais la réalité la rattrape vite elle manque de s’étouffer et sa mère appelle vite un médecin. Cela ne va pas être la seule frasque de l’enfant comme un jour où elle va sauter d’une fenêtre avec un parapluie pensant s’envoler dans les airs.
A 20 ans (en 1911) étudiante en philosophie, elle publie un recueil de poème intitulé Arethusa elle n’en parle qu’à son cousin mais ses parents très conservateur le trouvant choquant l’envoi alors dans un couvent. La jeune femme ne se laisse pas aussi facilement faire. Pour arriver à ses fins elle entame une grève de la faim. Son père finit par céder et la ramène chez eux.
New York
Pour fuir un aspirant russe (laid de surcoît) Elsa trouve un boulot de bonnes d’enfant à Londres. Elle y rencontre le comte Wilhem et l’épouse. Elle décide de le suivre à New York. Ils vivotent, Elsa fait des petits boulots. Son mari volage et charlatan l’abandonne peu de temps après la naissance de leur fille Maria Luisa Yvonne (surnommé Gogo). Seule, pauvre avec un bébé elle tente de s’en sortir dans cette ville étrangère dont elle ne parle pas bien la langue. À presque 30 ans avec l’échec de son mariage et la mort de son père, Elsa est au plus bas.
Mais au cour de leur voyage Elsa et son mari avait fait connaissance avec Gabrièle Picabia (mariée à Francis Picabia). Elsa et Gabrièle avait prévu de se revoir à New York. Elsa l’a décrit comme une femme intelligente et généreuse. Gabrièle présente Elsa à son cercle d’amis artistes comprenant Alfred Stieglitz, le baron de Meyer, Marcel Duchamp, Man Ray… Là-bas elle se lie aussi d’amitié avec Blanche Hayes. C’est d’ailleurs cette dernière qui lui suggère d’aller à Paris (une ville moins cher que New York) lorsqu’Elsa apprend que sa fille est malade.
Paris
Paris est synonyme de nouveau départ pour Elsa. Gabrièle la met en relation avec des artistes parisiens. Elsa entame aussi la procédure de divorce avec son mari et reprend son nom de jeune fille : Schiaparelli.
Elle note en 1954 ” Si je suis devenu ce que je suis, je le dois à deux facteurs, la pauvreté et Paris. La pauvreté m’a obligé à travailler, et Paris m’a fait aimé ça “
Elsa essaye de s’en sortir comme elle peut sa mère l’aide un peu mais ça ne couvre absolument pas tous ses besoins. Elle achète des objets aux puces et les revends aux antiquaires.
Elsa entre pour la première fois dans un maison de couture accompagnée de son amie. Son amie choisit des robes. Elsa vagabonde, oublie où elle se trouve, essaye différents vêtements. Alors qu’elle essaye un manteau quelqu’un lui demande “Pourquoi ne l’achetez-vous pas Mademoiselle ? On jurerait qu’il a été fait pour vous.” C’est Paul Poiret en personne qui lui a adressé la parole. Elle réponds “Je ne peux pas l’acheter il est certainement trop cher, et à quelle occasion le porter ?” – “Ne vous en faites pas pour le prix. Et vous, vous pourriez le porter n’importe où et n’importe quand”. Débute alors une amitié entre eux deux. Paul Poiret lui fera don de beaucoup d’autres pièces.
Le début du succès
Plutôt que de continuer la peinture ou la sculpture Elsa veut dessiner des vêtements et des costumes. À cette époque là la mode prend une nouvelle direction, l’accent est mis sur la simplicité et le sport. Le pull est alors devenu un symbole de modernité dans les années 1920. C’est d’ailleurs grâce au pull qu’Elsa se fait connaître.
En 1927, un élégant américain rend visite à Elsa. Il porte un pull tricoté main confectionné par une arménienne. Elsa prend contact avec une réfugiée arménienne qui habite non loin de chez elle. Elsa lui demande de reproduire un nœud en trompe-l’œil. Elsa le porte un jour lors d’un déjeuner et celui-ci fait sensation. Un acheteur du magasin Strauss la remarque et lui comme quarante pull ainsi que des jupes. Enthousiasmé par ce succès elle ouvre une boutique rue de la Paix en 1928 qu’elle nomme “Pour le Sport”. Elle apporte beaucoup d’innovations dans ce domaine : combinaison de pilote pour femme, jupe porte-feuille (qui a d’ailleurs choqué les âmes puritaines). La créatrice à elle-même reconnu que le courage et l’ignorance ont été les facteurs de son succès à rue de la Paix.


Elle a su tiré de sa lacune un avantage, elle ne savait ni tricoté ni coudre mais elle conçoit le vêtement comme une architecture. Ainsi elle permet aux femmes de s’affirmer dans ces créations : tailleur, épaules marquées, motif tape à l’oeil…
La mode et l’art
À partir des années 1930, la créatrice présente ses collections. Mais elle ne les présente pas n’importe comment. Elle les transforme en de véritable spectacle. C’est du jamais vu : éclairage théâtraux, chorégraphie, musique. C’est aussi la première à présenter ses collections par thème. Collection Païenne, Musique (1939), Esquimau, Astrologique mais sa plus fameuse est celle du cirque (1938). Les boléros du soir sont brodés d’éléphants et d’acrobates. Acrobates qui se retrouvent aussi en formes de boutons. Les sacs ressemblent à des ballons. L’originalité et la créativité est au rendez-vous.

Elsa est à l’origine de nombreuses autres innovations. C’est la première à utiliser les zip comme un élément décoratif tel une broderie. Elle détourne des éléments de leur fonction première comme le fameux chapeau escarpin ou les gants noirs ornés d’ongles rouges. Elle imagine une nouvelle couleur qu’elle appellera le rose shocking.
Elle baigne dans un milieu artistique et fréquente Man Ray, Meret Oppenheim et bien d’autres. Proche de la mentalité des dadaistes et des surréalistes elle aime inventer des jeux visuels et humoristique. Décidément pionnière en beaucoup de chose, c’est elle aussi la première couturière à collaborer avec des artistes comme Jean Cocteau, Christian Bérard, Leonor Fini…. Mais sa collaboration la plus connue est celle avec Salvador Dali. Ils pensent notamment ensemble la fameuse robe homard, la robe tiroir ou la robe squelette.





Influences
L’aspect très théâtrale de ses créations (comme la fameuse cape Phoebus créer en collaboration avec la maison Lesage) inspire de nombreux couturier et artistes. Elle inspire ainsi des costumiers d’Hollywood comme Edith Head ou Gilbert Adrian. Elsa elle-même à créer des costumes pour des films.
Elle a eut aussi un énorme impact sur son ami Yves Saint Laurent. Sa collection de 1971 qui fit scandale est largement inspiré de Schiaparelli : pantalon pour femme, épaules marquées, motifs brodés…


